Un traité d’interdiction des armes nucléaires: Huit mythes dissipés
"C’est irréaliste."
- En décembre 2016, la grande majorité des États s'est prononcé pour le lancement de négociations sur un traité d'interdiction en 2017. Deux sessions sont prévus, du 27 au 31 mars et du 15 juin au 7 juillet 2017.
- Un document juridiquement contraignant pour interdire les armes nucléaires peut être négocié à tout moment par les États intéressés. Son succès ne dépend pas du soutient ou de la participation d’un Etat ou d’un groupe d’États en particulier.
- UPDATE: Le traité sur l'interdiction des armes nucléaires a été adopté le 7 juillet 2017 à New York.
"Cela porterait atteinte au Traité de non-prolifération."
- L’article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) requiert que tous les États membres s’engagent à poursuivre des négociations de bonne foi pour le désarmement nucléaire. L’interdiction des armes nucléaires aiderait à mettre en œuvre cette disposition clé du traité. Tout comme le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires, ce futur traité viendrait compléter le TNP.
- La menace majeure pour l’avenir du TNP est la poursuite des investissements économiques dans les armes nucléaires et le refus des États possédant des forces nucléaires comme de leurs alliés de prendre des mesures significatives pour mettre fin à leur dépendance aux armes nucléaires.
- UPDATE: Le traité sur l'interdiction des armes nucléaires ne libère pas les États des obligations qui leur incombent en vertu des accords de garanties TNP.
"Les conditions de sécurité ne sont pas propices."
- L’état actuel de la sécurité internationale prouve d’autant plus que le progrès dans le domaine du désarmement nucléaire est crucial et urgent. L’objectif même d’un traité d’interdiction est de créer les conditions favorables au désarmement et à la sécurité.
- L’obligation juridique de poursuivre les efforts de désarmement nucléaire n’est pas conditionnée à l’existence d'un context de sécurité "favorable".
- Il est illogique d’attendre la mise en œuvre d’un monde exempt d’arme nucléaire, ou l’atteinte d’un "point de minimalisation" (c’est-à-dire lorsqu’il y aura très peu d’armes nucléaires), pour commencer les négociations sur l’interdiction de ces armes. Le droit a pour vocation de favoriser le changement et non pas d'avaliser la solution d'un problème.
"Il sera impossible de vérifier et d’assurer l’application du traité."
- Tel que noté par le groupe de travail de l’ONU sur le désarmement nucléaire (OEWG), le traité proposé serait une mesure intérimaire ou partielle. Les mécanismes pour vérifier la destruction des ogives nucléaires seront négociés ultérieurement.
- À cet effet, un document juridiquement contraignant pour interdire les armes nucléaires serait différent d’une convention générale sur les armes nucléaires. Ce traité ne chercherait pas à établir dès maintenant le cadre de travail complet pour atteindre l’élimination.
"Ce traité ne serait pas suffisamment détaillé."
- Les États possédant des armes nucléaires ont eu de nombreuses opportunités de négocier une convention générale sur les armes nucléaires, que ce soit à la Conférence du désarmement ou ailleurs. D’ailleurs, plusieurs s’opposent à un tel plan d’action.
- Les États non dotés d’armes nucléaires peuvent continuer de plaider en faveur d’une convention sur les armes nucléaires tout en soutenant l'ouverture immédiate de négociations sur un traité d'interdiction plus limitée.
"Cela détournerait l’attention des autres initiatives."
- Les négociations pour un traité d’interdiction sur les armes nucléaires peuvent coexister avec d’autres initiatives ayant pour objectif de faire progresser le désarmement nucléaire, tel qu'un traité sur l'arrêt de la production de matières fissiles, proposé depuis longtemps.
- Des négociations multilatérales pour le désarmement nucléaire sont dans une impasse depuis plus de deux décennies à cause de l’opposition des États disposant d’armes nucléaires. Poursuivre l’élaboration d’un traité d’interdiction pourrait dénouer cette impasse.
"Cela n’aurait aucun effet."
- La forte résistance de certains États disposant d’armes nucléaires à un tel traité suggère que cela aurait un impact significatif sur leurs politiques et leurs pratiques militaires, et ce même s’ils décident de ne pas y adhérer.
- Un traité qui interdirait les armes nucléaires contribuerait à la stigmatisation progressive des armes nucléaires. L’expérience démontre que l’interdiction d’un type d’arme précis stimule le progrès vers son élimination.
- En vue de la forte opposition publique aux armes nucléaires dans la plupart des États, il semble probable que beaucoup d'États qui aujourd'hui prétendent à la "protection" des armes nucléaires seront finalement susceptibles de signer le traité.
- UPDATE: Un État qui dispose d'armes nucléaires sur son territoire peut devenir parti au traité sur l'interdiction des armes nucléaires, pourvu qu'ils se conforme aux dispositions relatives au désarmement.
"Les États dotés d’armes nucléaires doivent être impliqués."
- Il est vrai que la participation des États disposant d’armes nucléaires est indispensable dans les négociations pour la destruction des arsenaux nucléaires. Cependant, les États non dotés d’armes nucléaires peuvent très bien aller de l’avant sans le soutient immédiat des États disposant d’armes nucléaires et négocier un traité d’interdiction qui renforce la norme internationale contre les armes nucléaires.
- Les États disposant d’armes nucléaires ont depuis longtemps échoué à prendre aux sérieux leurs obligations. Nous ne pouvons pas nous permettre d’être à la merci d’une minorité réticente à de telles initiatives.
- UPDATE: Les États sans armes nucléaires ont pris le contrôle de la situation et ont mené des négociations sur un traité d’interdiction à terme avec succès. Les États disposant d’armes nucléaires ont refusé de participer aux négociations. L’objectif est maintenant de les convaincre de se joindre au traité quand ils se seront mis d’accord sur un désarmement équilibré. Le traité d’interdiction devra alors être enrichi par plusieurs accords complémentaires, y compris des mesures de vérification de la destruction de leurs armes nucléaires.